Maîtriser ses émissions : pourquoi il faut aller au-delà du scope 1

Le reporting réglementaire des émissions de gaz à effet de serre impose de comptabiliser le scope 1, mais la majorité de l’empreinte carbone d’une entreprise se cache ailleurs. Les chaînes d’approvisionnement, les déplacements professionnels et l’usage des produits représentent souvent plus de 80 % des émissions totales, largement ignorées dans les obligations minimales.
Limiter son engagement au périmètre direct ne permet ni de répondre efficacement aux exigences grandissantes des partenaires, ni de préparer l’arrivée de normes européennes plus strictes. Les choix méthodologiques et les leviers d’action se révèlent alors déterminants pour anticiper les évolutions réglementaires et réduire l’impact réel.
Plan de l'article
Comprendre les scopes du Bilan Carbone : bien plus qu’une simple classification
Le bilan carbone n’a rien d’un simple exercice de conformité ou d’une case à cocher. Il s’appuie sur une méthodologie robuste, issue à la fois du GHG Protocol et de la norme ISO 14064, pour mesurer, organiser et piloter la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES). Trois catégories structurent cette approche :
- Le scope 1 regroupe les émissions directes contrôlées par l’entreprise, issues par exemple de la combustion sur site ou d’activités industrielles.
- Le scope 2 concerne l’impact généré par la consommation d’électricité, de chaleur ou de vapeur achetée, des émissions souvent sous-estimées mais pourtant bien réelles.
- Le scope 3 englobe tout le reste : les achats, le transport, les déplacements professionnels, l’utilisation et la fin de vie des produits, bref, l’ensemble de la chaîne de valeur.
La difficulté ne réside pas dans la définition de ces scopes, mais dans la capacité à remonter des données fiables et à en assurer la traçabilité. L’association Bilan Carbone et l’Ademe recommandent de s’appuyer sur la base carbone pour renforcer la qualité des estimations. Prendre en compte toutes les émissions directes et indirectes donne accès à un diagnostic fidèle et utile pour décider où agir. Le bilan carbone entreprise ne s’arrête donc pas aux portes du site de production ou du siège ; il englobe tout l’écosystème, fournisseurs, clients, partenaires. C’est le niveau d’exigence que la crise climatique impose aujourd’hui.
Pourquoi se limiter au scope 1 ne suffit plus aujourd’hui ?
Se contenter d’un reporting sur les seules émissions directes, le fameux scope 1, revient à ignorer la plus grande partie du problème. La majorité de l’empreinte environnementale d’une entreprise se niche ailleurs : selon les chiffres de l’Ademe, les émissions indirectes (scopes 2 et surtout 3) peuvent dépasser 80 % de l’empreinte carbone entreprise. Achats, transport, utilisation des produits : ce sont ces postes qui pèsent le plus lourd, loin devant le chauffage des locaux ou la flotte de véhicules.
L’analyse du cycle de vie le démontre : produire, acheminer, utiliser et recycler un bien génère une série d’émissions qui, bien qu’invisibles pour le siège social, pèsent lourd dans le bilan carbone final. Les obligations fixées par le rapport RSE ou la DPEF montent en puissance. Désormais, investisseurs et régulateurs exigent une vision globale, fidèle à la réalité de la chaîne de valeur, pour accélérer la transition écologique et répondre aux engagements de développement durable.
Se limiter à une démarche partielle expose à bien plus qu’un simple risque d’image ou de conformité : c’est passer à côté d’opportunités concrètes de réduction des émissions et d’innovation. La transformation bas carbone concerne chaque métier, chaque fonction, du choix des fournisseurs à la conception de produits sobres en carbone. La dynamique ne s’arrête plus à la sortie de l’usine ; elle irrigue l’ensemble de la stratégie d’entreprise.
Des leviers concrets pour agir sur l’ensemble de votre empreinte carbone
Pour réduire efficacement l’empreinte carbone d’une structure, viser uniquement les émissions directes ne suffit pas. Il s’agit d’activer différents leviers à chaque étape de la chaîne de valeur. La première étape, incontournable : établir une cartographie fine des émissions, en s’appuyant sur la méthode bilan carbone de l’Ademe et les référentiels GHG Protocol et ISO 14064. Cette démarche donne un socle solide pour identifier les meilleures pistes de progrès.
Voici les axes majeurs à explorer pour agir concrètement :
- Les achats jouent un rôle déterminant : selon l’Ademe, les matières premières, fournitures et prestations externes représentent souvent plus de la moitié des émissions indirectes. Sélectionner des fournisseurs responsables, intégrer des critères bas carbone dans les appels d’offres, privilégier les circuits courts, autant de décisions qui transforment la donne.
- L’analyse du cycle de vie (ACV) offre une vision précise des phases où l’impact est le plus fort, de la conception jusqu’au recyclage. Repenser la durée de vie des produits, faciliter la réparation ou le réemploi permet de réduire l’empreinte environnementale sur le long terme.
- L’engagement des équipes fait toute la différence. Former, sensibiliser et embarquer tous les collaborateurs dans la démarche bilan carbone est désormais incontournable pour inscrire durablement la transition écologique dans l’ADN de l’entreprise.
En allant au-delà du scope 1, chaque organisation se donne la chance d’anticiper les futures exigences, de gagner en crédibilité et surtout d’agir sur les volumes d’émissions qui comptent vraiment. La trajectoire bas carbone ne se décrète pas, elle se construit dans la durée, à chaque décision, à chaque maillon.
À l’heure où la pression réglementaire s’intensifie et où la demande de transparence ne faiblit pas, ceux qui choisissent une approche large et sincère du bilan carbone prennent une longueur d’avance. La différence se joue désormais dans la capacité à regarder au-delà de l’évidence, à intégrer toute la chaîne de valeur et à activer les leviers là où ils pèsent vraiment.